En cette fin de millénaire il semble naturel de s'interroger une fois de plus sur le mystère qui entoure le personnage le plus important de l'histoire du monde occidental : Jésus-Christ. Après des siècles d'études et de controverses et malgré le consensus apparent qui semble s'être installé sur ce sujet brûlant entre croyants et non croyants l'énigme fondamentale demeure non résolue. Dieu, homme ou mythe ? C'est en partant de cette triple interrogation que je m'efforcerai de prendre part au débat en non spécialiste. En relisant simplement mais exhaustivement les textes (essentiellement le Nouveau Testament) je tenterai de montrer que les opinions les plus répandues ne sont pas forcément les plus logiques. Tout au long de cet essai j'utiliserai comme guide le fameux principe du rasoir d'Ockham ou principe dit d'économie selon lequel il ne faut pas multiplier les hypothèses qui ne sont pas nécessaires à l'explication d'un phénomène.
"Dieu existe -il ?" est une question métaphysique qui entraîne le débat vers le terrain de la philosophie et des sciences fondamentales. Une réponse négative à cette interrogation (athéisme) a bien sur des conséquences immédiates sur le sujet de notre exposé mais inversement l'absence de réponse (agnosticisme) ou même une réponse positive (croyance) n'est pas décisive sur l'issu d'un débat essentiellement historique. On mélange bien souvent inutilement dans les discussions à propos de religion des questions qui relèvent de la métaphysique (ou de la physique) telles que :l'existence de Dieu, la réalité du monde (réalisme ou idéalisme) ou encore la dualité matière esprit (spiritualisme/matérialisme) avec des questions qui relève plus simplement de l'histoire de l'humanité : réalité des événements bibliques (Adam et Eve, péché originel, Déluge, prophètes, Messie, Jésus),rapports entre religions révélées et mythes. L'objet de cet essai sera donc exclusivement consacré à l'histoire de Jésus-Christ.
La triple interrogation mentionnée plus haut en constitue le sujet central. En fait le débat actuel se résume bien souvent aux deux premières questions. Si les chrétiens affirment que Jésus n'est autre que le fils de Dieu qui s'est fait homme afin de venir sur Terre racheter nos péchés, et qui pour ce faire est mort sur la croix puis est ressuscité, les non croyants admettent quant à eux sans réserve que Jésus était un homme exceptionnel dont le message original a été après sa mort transformé en religion par ses disciples. L'existence du Jésus de l'histoire n'est plus discutée de nos jours et est considérée par la grande majorité des historiens comme scientifiquement démontrée.
Jésus fait donc partie des livres d'histoire au même titre que Jules César ou Charlemagne. Dans un récent manuel d'histoire d'une classe de 6eme il est même précisé que durant sa vie Jésus a accompli des miracles comme d'autres font des découvertes ou des conquêtes. Cette banalisation du phénomène Jésus, personnage historique incontestable renvoie aux oubliettes de l'histoire la troisième partie de notre triple interrogation : Le mythe Jésus?
Bien qu'il ne soit pas "politiquement correct" de reformuler une hypothèse que beaucoup considèrent comme farfelue nous montrerons bien au contraire que rien n'étant démontré en définitive on se doit de n'éluder aucune piste dans ce que nous conviendrons d'appeler dès à présent : L'énigme Jésus.
De l'interrogation posée ci-dessus il ressort que trois visions synthétiques du personnage de Jésus sont possibles. Par souci de clarté avec le reste de cet essai nous conviendrons d'appeler ces visions des paradigmes signifiant par là qu'il s'agit de modèles synthétiques pour ,chacun desquels on peut rattacher une grille de lecture bien spécifique des événements bibliques. Le terme emprunté au vocabulaire de Thomas Khun (La structure des révolutions scientifiques) sera utilisé ici dans un sens analogue à celui réservé par le philosophe aux modèles théoriques des sciences. Nous verrons en outre comment d'un paradigme à l'autre la lecture des mêmes textes bibliques est différente et plus particulièrement la signification attachée à tel ou tel événement narratif.
Les trois paradigmes en question font écho à la triple interrogation initiale : Dieu ,Homme ou mythe et seront appelés dans l'ordre de la discussion : Le paradigme chrétien, le paradigme rationaliste et le paradigme mythique.
La vision synthétique proposée par les églises chrétiennes quelles soient catholiques, protestantes ou orthodoxes est à quelques détails près celle enseignée par les catéchismes.
Dieu a envoyé son fils Jésus Christ sur terre en lui conférant le pouvoir de racheter par son sacrifice les péchés de tous les hommes. Jésus est le sauveur (sens du mot Jésus) et aussi le Messie (sens du mot Christ) dont le règne annoncé et imminent doit venir s'accomplir sur toute la Terre. Consubstantiel au père Jésus est également par là même le créateur de l'univers et de toutes choses. Les points essentiels qui constituent les piliers de cette première vision sont les suivants :
- Naissance d'une Vierge
- Accomplissement de nombreux miracles qui sont autant de signes permettant d'affirmer son identité
- Message d'amour et d'humilité à destination de tous les hommes (juifs et non juifs) délivré sous forme de paraboles
- Crucifixion pour sauver l'humanité
- Résurrection
- Ascension vers Dieu
- Promesse de retour et d'établissement d'un royaume céleste
Quelle que soit la lecture critique ou naïve que l'on puisse faire des évangiles les points énumérés ci-dessus constituent le socle inébranlable sur lequel repose tout l'édifice de ce premier paradigme. On verra qu'à l'intérieur de cet ensemble on peut effectuer une lecture assez cohérente des textes du nouveau testament (cohérente bien que pourtant étonnante).Ainsi en va t-il des miracles et de la résurrection dont le caractère surnaturel ne présente ici aucune contradiction avec les axiomes de base de la théorie (Jésus fils de Dieu créateur de l'univers et de ses lois a bien naturellement le pouvoir de suspendre l'ordre naturel des choses).
C'est faut-il le rappeler une dernière fois la seule alternative au modèle chrétien qui est proposée de manière officielle au non croyant que celui-ci soit athée ou simplement agnostique. Ce modèle sans Dieu ni surnaturel tentera d'expliquer le personnage de Jésus ,homme de l'histoire peu commun, à partir de la biographie incomplète racontée par les évangiles. La première observation que l'on fera à propos de ce paradigme est qu'il renferme en son sein de nombreux courants d'opinions et d'interprétations variés. Pour plus de clarté essayons de cerner comme ci-dessus les piliers fondamentaux de ce modèle.
- Jésus est né en Palestine vers la fin du règne d'Hérode et a vécu au début du premier siècle de notre ère.
- Jésus a enseigné sous forme de paraboles un message d'amour et de générosité
- Jésus a été arrêté et jugé par Ponce Pilate et le Sanhédrin (Conseil juif)
- Jésus est mort crucifié sur le Golgotha
- Après sa mort les apôtres ont fait connaître au monde son enseignement et sa vie
En ce qui concerne les événements surnaturels (miracles et résurrection) on distingue schématiquement deux courants que l'on pourrait qualifier d'interprétation faible (resp. forte du paradigme).
Dans l'interprétation faible les éléments surnaturels sont simplement gommés de la réalité comme autant d'inventions (d'embellissement) de la part des narrateurs .Ceux-ci dans le souci de diffuser et surtout d'amplifier le message de Jésus afin de transformer celui-ci en religion naissante ont ajouté au cours du temps les événements suivants : Résurrection , guérisons miraculeuses et naissance virginale.
Dans l'interprétation forte les éléments surnaturels sont "expliqués" et ré-interprétés selon une grille de lecture purement rationaliste : C'est par exemple la thèse de Gérald Messadier dans son livre : L'Homme qui devint Dieu. Les évènements ont bien eu lieu tels que les narrateurs nous les décrivent mais ont été mal compris par les témoins directs et doivent par conséquent être ré-examinés selon une perspective moderne.
La thèse du mythe après être complètement tombée dans l'oubli et décriée par tous les spécialistes du Nouveau testament a été soutenue de nouveau depuis 1975 dans les livre de G.A. Wells .Et plus récemment sur Internet sur le site de Earl.Doherty.
Comme nous essaierons de le montrer tout au long de cet essai le modèle ou paradigme du Mythe, loin d'être une thèse à l'abandon constitue pour le non croyant une grille de lecture beaucoup plus cohérente de l'ensemble des textes qui sont à sa disposition . Cette grille de lecture proposée dans ce paradigme permet de réinsérer plus facilement les textes chrétiens du Nouveau testament dans leur contexte d'origine sans avoir recours aux nombreux artifices et contorsions d'usage utilisés dans le modèle précédent.
Les points fondamentaux de ce paradigme sont les suivants:
- Le Christianisme est né dans plusieurs communautés de Palestine et des environs selon une évolution normale et attendue de la religion juive dominante de l'époque.
- Sous l'influence des religions à mystère et de la philosophie grecque de nouvelles idées ont peu à peu émergé au sein de plusieurs communautés juives avec en toile de fond cette vision partagée d'un Sauveur ou Messie dont l'arrivée annoncée par les écritures (Ancien Testament) était pressentie comme imminente.
- La première image qui émerge est donc tout naturellement celle d'un être spirituel (Le Christ) sans qu'il soit question d'une quelconque "incarnation" au sens propre. Cette première vision est celle de Paul et des auteurs des diverses épîtres qui constituent les textes les plus anciens dont nous disposons.
- Peu à peu une de ces communautés (ou plusieurs) construit une "histoire" d'un Christ " homme" en ajoutant au fur et à mesure des récits mélangeant contexte historique de l'époque et personnages fictifs comme il est de coutume depuis les débuts de l'écriture de l'Ancien Testament (Adam, Noé et Moïse),sans doute par souci de pédagogie religieuse ou pour d'autres motifs plus naturels à l'époque. Il ne s'agit pas bien entendu d'une invention ou création au sens moderne du terme mais plus certainement l'expression d'une tradition religieuse de l'Antiquité. Les Evangiles qui décrivent la vie de Jésus Christ apparaissent ainsi postérieurement aux Epîtres.
Il existe bien entendu d'autres lectures possibles de la bible. On peut citer en autres celles des musulmans et des juifs, ou bien celle des déistes. Dans les deux premiers cas l'existence de Jésus n'est pas remise en cause ,mais celui-ci n'est pas reconnu comme étant le fils de Dieu. La grille de lecture reste toutefois assez proche de celle des chrétiens (abstraction faite de la résurrection ).Le déiste quant à lui ne croit pas à une intervention directe de Dieu dans les affaires humaines et pourra donc choisir d'adopter dans ce cas précis une vision rationaliste ou mythique. En définitive ces lectures supplémentaires n'apportent rien de plus dans le présent débat et ne seront dons pas prises en considération par la suite.
Dans l'analyse des textes ci-dessous on s'efforcera de mettre en relief les points forts et les points faibles de chacun des paradigmes et d'établir deux faits:
- L'existence de Jésus loin d'être prouvée de manière certaine comme certains veulent le laisser croire pourrait n'être qu'assez peu probable.
- La thèse du mythe doit être prise en considération pour des raisons aussi bien historiques que logiques.
Les premières recherches historiques critiques sur la vie de Jésus remontent au dix-huitième siècle. Jusqu'alors les textes étudiés sans relâche par des générations de théologiens n'avaient guère fait l'objet d'une remise en cause et l'on comprend bien pourquoi. Il s'agissait plutôt de défendre coûte que coûte le dogme établi au troisième et quatrième siècle de notre ère. Les premiers historiens ayant osé jeté un regard critique sur la bible et en particulier sur les évangiles n'ont pas du , on s'en doute , voir leur tâche facilitée par les autorités de l'Eglise soucieuses avant tout de défendre le caractère sacré des écritures.
Parmi les contributeurs les plus marquants de cette histoire nous retiendrons les noms suivants:
Hermann Samuel Reimarus (1694-1768) : Son étude publiée en 1774 par Gotthold Lessing établit une distinction entre le personnage de Jésus et l'image perpétuée par les apôtres qui auraient dérobé le corps de celui-ci pour faire croire à sa résurrection dans le but d'établir plus efficacement les fondements de la nouvelle religion. Dans son texte Reimarus affirme en outre que Jésus n'a accompli aucun miracle. Cette première œuvre s'inscrit donc parfaitement dans le cadre du paradigme rationaliste avec une négation pure et simple des miracles et une tentative d'explication assez naturelle de la résurrection. Notons au passage que les évangiles mentionnent très clairement ce risque de voir les disciples de Jésus tenter de voler le corps de leur maître dans le but de proclamer la résurrection et justifient ainsi l'envoi de gardes pour surveiller l'entrée du Tombeau.
Karl Friedrich Bahrdt (1741-1792) : Cet auteur fait de Jésus un Essénien féru de culture grecque qui échappe à la mort grâce à Nicomède et Luc et qui finit ses jours dans une communauté essénienne. Ici non plus il n'est pas question de miracles et une nouvelle explication rationnelle est donnée de la résurrection et du tombeau vide à la manière de Gérald Messadier.
David Friedrich Strauss(1808-1874) : C'est le premier auteur qui parle sans ambiguïté de mythes à propos de la plupart des évènements de la vie de Jésus. Sans aller jusqu'à nier complètement l'existence de celui-ci il considère néanmoins comme erronées les explications rationalistes des miracles. Il affirme également que les auteurs des évangiles ne sont pas des témoins de la vie de jésus.
Ernest Renan (1823-1892) : Sa vie de Jésus est une des plus célèbres mais aussi sans doute une des plus critiquée pour son manque d'objectivité. Son œuvre s'inscrit sans problème dans la paradigme chrétien qu'elle vient conforter dans une tentative historico-romanesque.
Albert Schweitzer : Dans son livre : La recherche historique sur la vie de Jésus publié en 1906 Albert Schweitzer affirme que Jésus est un prophète ayant un message eschatologique (fin du monde) mais que l' on ne peut rien savoir de sa vie; la recherche historique est un échec et le Jésus de l'Histoire ne peut être découvert.
Cette conclusion défaitiste d'Albert Schweitzer sera reprise en 1920 par Rudolph Bultmann qui considérera comme vaine et illégitime toute recherche historique sur la vie de Jésus. On ne peut rien savoir de la vie ni de la personnalité de Jésus.
Depuis les années 70 les méthodes d'investigation interdisciplinaires : historiques et scientifiques (archéologie) tentent de porter un regard nouveau sur le personnage de Jésus et afin de mieux cerner sa personnalité s'intéressent au milieu dans lequel Jésus est supposé avoir vécu (La Palestine du début du premier siècle).
De nombreux documents ont été mis à jour depuis la fin de la Guerre (manuscrits de la mer morte, évangile de Thomas) qui facilitent la mise en œuvre de ce programme. Malgré tout on est encore loin de pouvoir tirer des conclusions définitives sur ce qui demeure il faut bien l'avouer une énigme totale.
Les travaux récents du Jesus Seminar (1993) aux Etats-Unis montrent que les textes passés à la moulinette des analyses et des exégèses les plus serrées nous apprennent en définitif bien peu de choses surtout lorsque ceux-ci sont lus avec l'idée préconçue que les événements relatés appartiennent à l'histoire plutôt qu'au mythe. L'étude menée sur plusieurs années par ces spécialistes conclue que plus de 80% des paroles attribuées d'ordinaire à Jésus n'auraient en réalité pas été prononcées par lui. Dans cette optique il faut admettre que Jésus a bel et bien existé mais n'a tenu aucun des propos ni commis aucun des actes que nous lui connaissons. Autant dire que c'est l'existence même du personnage qui en prend un sacré coup car à force de mettre en doute tous les événements de sa vie celle-ci devient tellement peu "connaissable" que l'on comprend de moins en moins le caractère historique du personnage.
Depuis une vingtaine d'années une littérature abondante (surtout anglo-saxonne) s'est emparée du sujet avec des contributeurs importants dans chacun des paradigmes mentionnés ci-dessus.
L'école mythique est largement représentée par des gens comme : John M. Robertson, T.Whitaker Robert Taylor,G.A. Wells ou encore Earl Doherty (sur Internet).
L'école rationnaliste a trouvé son porte parole en France en la personne de Gérald Messadié dont le best seller : "L'Homme qui devint Dieu" représente sans ambiguïté la tendance maximaliste de cette école. Pour cet auteur en effet tous les événements de la vie de jésus y compris même sa naissance miraculeuse sont interprétables en termes rationnels. Nous verrons plus loin dans l'analyse des textes ce que cela implique.
On peut citer aussi le livre de John Dominic Crossnan : "'The Historical Jesus, the life of a Mediterranean Jewish peasant" qui dépeint Jésus comme un paysan juif adepte de l'école philosophie cynique.
Le paradigme chrétien reste traditionnellement représenté par des auteurs croyants qui tentent pour certains de tempérer l'interprétation orthodoxe de L'église en proposant une grille de lecture plus moderne des évangiles mais sans renoncer à aucun des éléments fondamentaux de ce paradigme.
En France on peut citer entre autres: Jacques Duquennes et André Frossard pour les plus connus.
Aux Etats-Unis il faut citer l'incontournable Josh Mac Dowell dont l'ouvrage : Evidence that demands a verdict constitue une tentative de démonstration rationnelle de la véracité des thèses chrétiennes.
Avec l'arrivée d'Internet ce sont maintenant des centaines d'articles et de textes (tous genres confondus) qui viennent enrichir le débat. On trouvera en annexe les liens vers les sites les plus pertinents.
Avant d'entamer une lecture commentée des textes du nouveau testament il est souhaitable de faire un petit rappel sur les documents en présence.
Ceux-ci sont très nombreux et se divisent généralement en deux familles : les textes du Canon considérés comme seuls fiables par l'Eglise catholique et les autres appelés apocryphes moins connus mais tout aussi intéressants.
Une édition actuelle comme par exemple la bible de Jérusalem comprend donc:
- Les quatre évangiles de Marc, Luc Matthieu et Jean. Les trois premiers sont qualifiés de synoptiques car ils peuvent être posés en parallèle l'un à côté de l'autre et lus de cette manière. Ils relatent tous les trois la vie de Jésus avec beaucoup de ressemblance mais aussi de divergence dans les détails comme nous le verrons. L'Evangile de Jean quant à lui met plus l'accent sur certains faits accomplis par Jésus et présente un caractère plus spirituel.
- Les Actes des Apôtres relatent la vie des principaux apôtres (Pierre et Paul) après la mort de Jésus.
- Les épîtres sont des lettres adressées par les apôtres aux premières communautés chrétiennes. Elles ne contiennent comme nous le verrons aucune information concernant la vie de Jésus (sa biographie ou des détails concernant les années passées en Palestine).Les épîtres du nouveau testament sont :
à Les épîtres de Paul : 1 et 2 Tessaloniciens,1 et 2 Corinthiens, Les épîtres aux Philippiens ,Galates, Romains, Colossiens et Ephésiens. L'Epître à Philémon;
à Les épîtres pastorales (1 et 2 Timothée ,Tite)
à L'épître de Jude
à Les deux épîtres de Pierre
à Les trois épîtres de Jean
à L'épître de Jacques
à L'épître aux Hébreux
- L'Apocalypse de Jean : texte surprenant qui dépeint une vision assez terrifiante du Jugement dernier.
De quand datent ces textes et qui en sont les auteurs ?
En ce qui concerne les évangiles ,la seule quasi-certitude que l'on est à même d'énoncer en toute objectivité est que l'on ignore totalement qui les a écrit ni à quelle période.
à Les nombreux manuscrits complets du nouveau testament datent tous du 4ème siècle après Jésus Christ (Codex Vaticanus et Codex Sinaiticus pour ne citer que les deux plus célèbres) .
à On trouve des papyrus plus anciens qui datent du 3ème siècle : ce sont les papyrus Chester Beatty qui contiennent les 4 évangiles et les actes.
à Des fragments de papyrus qui remontent au 2ème siècle ont été retouvés : ce sont les papyrus de John Rylands (130 après JC) qui renferment des extraits de l'Evangile de Jean ainsi que le papyrus Bodmer écrit aux alentours de l'an 200 et renfermant lui aussi des extraits de l'évangile de Jean.
Bien avant l'invention de l'imprimerie le seul moyen de conserver et de transmettre des documents était la copie faite à la main le plus souvent par des moines . La copie à l'identique n'était pas forcément garantie et l'existence de fréquentes interpolations (modifications mineures) des textes originaux est attestée par de nombreux historiens. Le but de ces interpolations était bien souvent de rendre tel ou tel passage plus conforme à une certain orthodoxie voir plus simplement de "rajouter" des compléments à des explications jugées insuffisantes ou trop fragmentaires. Toujours est-il que dans ces considérations il est bien difficile d'affirmer à la seule lecture des textes qui nous sont parvenus quels étaient les intentions réelles de leurs auteurs ni d'estimer en toute objectivité la sincérité et l'authenticité de leur récit.
Malgré les dates mentionnées ci-dessus qui accompagnent les documents en question il est généralement admis que les évangiles ont été écrits au 1er siècle de notre ère entre 60 et 65 pour l'évangile de Marc,80-85 pour ceux de Matthieu et Luc et 90-95 pour celui de Jean.
Ces dates sont postulées plutôt que démontrées et sont en accord avec l'hypothèse implicite de l'existence d'un Jésus historique. En fait l'examen global de l'ensemble des textes que nous esquisserons plus loin donne plutôt l'impression que les récits biographiques concernant Jésus (Les évangiles)sont plus tardifs (2eme siècle) en accord avec les fragments de documents réellement existants.
Plus aucun théologien expert du Nouveau testament ne défend aujourd'hui l'idée originelle stipulant que les auteurs des évangiles seraient des apôtres de Jésus (Matthieu et Jean) ou même des assistants dévoués de ceux-ci (Marc et Luc).Il est admis plus généralement que les véritables auteurs en question appartenaient plutôt à des communautés et que celles-ci ont emprunté les noms ci-dessus dans le souci évident de légitimer l'authenticité de leur récit.
L'exégèse classique attribue l'antériorité à l'évangile de Marc. Matthieu et Luc auraient écrit plus tard en s'inspirant de ce premier évangile et d'un autre document également plus ancien baptisé Q (Q est l'initiale du mot allemand Quelle qui signifie source).L'évangile de Marc tel que nous le connaissons serait le résultat quant à lui d'une évolution à partir d'un document primitif appelé proto-Marc ou Marc original. Le document Q lui aussi aurait été rédigé en plusieurs étapes ou "strates" appelés Q1 Q2 et Q3.
Dans la première strate Q1 figurent les maximes de morale les plus connues (Aime tes ennemis) et des passages que l'on retrouve dans les Béatitudes.
La deuxième strate Q2 contient les messages prophétiques et apocalyptiques des évangiles (annonce du jugement dernier) les critiques des pharisiens et Jean le Baptiste.
La dernière strate contient les miracles et certains épisodes de la vie de Jésus.
L'idée du sauveur venu racheté les pêchés des hommes et qui ressuscite après avoir été crucifié serait absente de ce document.
Cette théorie de la double origine des évangiles (Proto-Marc et Q) ne constitue pas un argument spécifique en faveur de tel ou tel paradigme. Tout au plus donne t-elle plus de consistance à la thèse du mythe en mettant en relief un aspect souvent contesté de cette école : Celui de la construction progressive de la biographie de Jésus dans un laps de temps de quelques dizaines d'années par un petit nombre de communautés.
Les dates de rédaction concernant les épîtres sont établies avec plus de certitude. Les premières épîtres de Paul auraient été écrites quelques années seulement après la date officielle de la crucifixion (vers 30 après JC) puis les autres épîtres s'échelonneraient jusque vers la fin du premier siècle.
Les auteurs des épîtres non pauliniennes ne sont pas connus avec précision. Comme pour les évangiles Les épîtres de Jude , de Pierre ou de Jean ne sont plus considérées par les spécialistes comme émanant des apôtres concernés mais plutôt de communautés. On parle ainsi de communauté johannique à propos des auteurs présumés des épîtres de Jean ,de l'évangile de Jean et du livre de l'apocalypse.
La première conclusion provisoire concernant les textes historiques du canon est que les documents les plus anciens sont les épîtres de Paul antérieures dans tous les cas aux premiers évangiles. Il est également vraisemblable (mais non définitivement établi) que les autres épîtres ont également été écrites avant les évangiles synoptiques tels que nous les connaissons (mais peut-être à la même époque que les protos évangiles de Marc et Q).
Les textes apocryphes consistent en des évangiles ,des actes, des épîtres et des apocalypses qui n'ont pas été reconnus par les pères de l'église comme suffisamment fiables (?) pour être admis dans le canon mais qui constituent néanmoins un complément d'information historique non négligeable pour mieux comprendre la genèse de la religion chrétienne. Ces documents couvrent une période allant du deuxième au septième siècle après JC. On compte environ plus d'une une vingtaine d'évangiles et autant d'actes, une dizaine d'épîtres et d'apocalypses. Parmi les textes les plus connus on peut citer:
à L'Evangile de Thomas retrouvé à Nag-Hammadi en Egypte en 1945.
Ce document qui contient des maximes de Jésus serait contemporain du document Q cité plus haut et peut-être issu de la même communauté ou d'une communauté voisine ?
à Le Protévangile de Jacques ,l'évangile des hébreux et les évangiles de l'enfance dont la fiabilité est jugée très faible par les spécialistes. Une liste plus exhaustive des principaux évangiles et actes apocryphes peut-être trouvée sur le site http://www.hrnet.fr/~dupuypas/Apocryphes/Les_Apocryphes_NT_tableau.htm
Les textes eux mêmes peuvent être lus sur le site : http://wesley.nnc.edu/noncanon.
Il convient de noter dès à présent que le degré de fiabilité de tel ou tel document n'est estimé que dans le paradigme chrétien qui possède implicitement une échelle de valeurs pré-établie pour jugée de l'authenticité des témoignages. Dans une moindre mesure aussi le paradigme rationaliste dispose de critères propres pour juger du caractère de plausibilité de tel ou tel document. L'hypothèse de l'existence d'un Jésus historique impose en effet un ensemble de contraintes sur ce que l'on peut savoir de sa vie et sur ce qui relève donc de l'invention et du conte.
Pour le paradigme mythique au contraire l'existence de nombreux documents apocryphes mêmes très différents dans le fond et dans la forme des textes habituels du canon constituent autant d'illustrations du processus de création d'un personnage à partir du vécu de plusieurs communautés chacune enrichissant l'histoire à sa façon.
On peut dire également que si l'existence de Jésus ne faisait aucun doute les récits concernant sa vie et son ministère tous issus de témoins de la première heure n'auraient pas du faire l'objet de débats aussi passionnés dans l'église pour décider de ce qui était authentique et de ce qui ne l'était pas.
Parmi les autres documents importants qu'il nous faut citer il y a :
à Les lettres de Clément de Rome
à Les lettres d'Ignace
à Le Didache
à L'épître de Barnabé
Les dates attribuées généralement à ces documents vont de 100 à 120 après JC. Ce sont donc des documents qui se rattachent aux tous débuts de la formation de L'Eglise et qui sont par conséquent très importants pour l'analyse qui suit.
Parmi les nombreux textes qu'il faut impérativement lire pour se faire une idée générale du phénomène chrétien figurent les textes des pères de l'Eglise qui relatent les nombreux débats à propos du Dogme qui ont eu lieu au sein même du clergé. A partir du deuxième siècle et jusqu'au cinquième siècle environ il a fallu en effet mettre en place le dogme définitif de la religion que nous connaissons aujourd'hui et en particulier résoudre les problèmes suivants :
à Parmi la multitude de textes (évangiles ,actes, épîtres, apocalypses) choisir les textes les plus véridiques ou authentiques qui vont ainsi former le canon du nouveau testament.
à Répondre aux interrogations et aux arguments des non chrétiens pour qui l 'existence et la nature de Jésus ne sont pas évidents.
à Combattre les différentes "hérésies" ou "hétérodoxies" (Marcionisme, Docétisme, Gnosticisme…) pour mieux assurer l'avenir d'une seule orthodoxie.
Ce programme va se réaliser progressivement du 2ème au 4ème siècle grâce au travail acharné des pères apologistes parmi lesquels on peut citer entre autres: Justin Martyr, Tertullian, Irénée, Clément d'Alexandrie, Théohile d'Antioche, Origen, Eusèbe de Césarée etc….Leurs écrits seront particulièrement instructifs pour mieux saisir ce phénomène dynamique de la naissance du dogme et peut être aussi mieux comprendre les relations entre les trois paradigmes. C'est notamment Irénée qui vers 185 après JC imposera les quatres évangiles que nous connaissons comme seuls authentiques et devant ainsi constituer le canon du Nouveau testament.
Les principaux documents sont disponibles sur le site consacré aux : Early Church fathers http://ccel.wheaton.edu/fathers2/:
Nous consacrerons un chapitre à l'analyse de ces documents.
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